History of the Peloponnesian War
Thucydides
Thucydides. Histoire de la Guerre du Péloponnése. Bétant, Élie-Ami, translator. Paris: Librairie de L. Hachette, 1863.
A la même époque de l’été, les Athéniens envoyèrent autour du Péloponèse trente vaisseaux commandés par Asopios fils de Phormion. Les Acarnaniens avaient demandé qu’on leur donnât un fils ou un parent de Phormion pour général[*](Il paraît qu’à cette époque Phormion était mort. On conçoit que sa campagne d’Acarnânie (II, lxviii), et surtout ses brillants combats maritimes (II, lxxxiii-xcii), eussent donné aux Acarna-niens une haute idée de ses talents militaires. ). Cette flotte côtoya le Péloponèse et ravagea le littoral de la Laconie. Ensuite Asopios renvoya la plupart de ses vaisseaux à Athènes, et n’en garda que douze avec lesquels il se rendit à Naupacte. Il fit lever en masse les Acarnaniens et marcha contre la ville d’OEniades [*](Sur la situation de cette ville, voyez liv. II, ch. en note 1. ). Lui-même remonta l’Achéloüs avec ses vaisseaux, tandis que l’armée de terre dévastait la campagne. Comme la ville résistait, Asopios licencia ses troupes de terre et fit voile pour Leucade. Il alla descendre à Néricos[*](Néricos ou Néricon, ville de l’Ile ou presqu’île de Leucade, quelquefois confondue avec Néfitos, îlot voisin d’Ithaque. ) ; mais, pendant sa retraite, il fut tué, avec une partie de son monde, par les gens du pays, joints à un détachement de la garnison[*](Les Corinthiens entretenaient des garnisons dans les villes de leur alliance situées sur les côtes, pour les préserver des déprédations. ). Les Athéniens remirent à la voile, après avoir fait avec les Leucadiens une trêve pour enlever leurs morts.
Cependant les députés de Mytilène partis sur le premier vaisseau s’étaient rendus à Olympie, d’après l’invitation des Lacédémoniens, qui voulaient que tous les alliés les entendissent et délibérassent sur leur requête. C’était l’olympiade où Doriéus de Rhode fut vainqueur pour la seconde fois [*](Olympiade 88 (428 av. J. C.). Thucydide ne désigne les olympiades que par le nom de l’athlète vainqueur (comparez liv. V, ch. xlix). L’indication numérique ne se rencontre que dans les auteurs d’un âge plus récent. On doute qu’elle soit authentique dans l’histoire grecque de Xénophon. Selon Polybe (XII, xii), l’historien Timée, contemporain d’Alexandre le Grand, fut le premier qui établit la chronologie d’après l’ère des olympiades. Ce fut postérieurement encore, par exemple par Diodore de Sicile, qu’elle fut suivie avec régularité. ). Après la fête, on se réunit en conférence, et les Mytiléniens parlèrent ainsi :
« Lacédémoniens et alliés, le principe établi chez les Grecs nous est connu. Le peuple qui, pendant la guerre, se détache d’anciens alliés, est choyé par ceux qui ont intérêt à TaccueiUir ; mais il ne doit pas s’attendre à leur estime, parce qu’il passe pour traître envers ses précédents amis. Cette opinion serait fondée si, entre les transfuges et ceux dont ils se séparent, il y avait réciprocité de sentiments et d’affection, équilibre de ressources et de forces, enfin absence de tout motif valable de rupture ; mais, entre les Athéniens et nous, rien de pareil. Il n’est donc pas étrange que, ménagés par eux pendant la paix, nous les abandonnions pendant la guerre.